Bienvenue à Pont-d'Ouilly |
Elément remarqué de la rentrée scolaire 2009/2010 : la suppression du préau.
Il occupait une place importante à la fois par son volume, mais aussi par ses différentes fonctions au cœur de l'école.
Il présentait également un autre intérêt, oublié avec le temps : les peintures qui subsistaient sur son côté ouest avaient été réalisées par Jean-Claude Dominguès.
Cet artiste ouillypontain, brutalement disparu en 1983, est peu à peu sorti de notre mémoire collective.
Voilà donc l'occasion de revenir sur ce personnage original et de retrouver certaines de ses œuvres.
Artiste peintre de Pont d'Ouilly, Jean-Claude Dominguès était connu, entre autre, pour ses extravagances.
On pouvait le croiser, été comme hiver, vêtu d'un manteau de fourrure, d'un col roulé en laine, d'une écharpe et de son indissociable paire de pantoufles.
Il apportait la dernière touche à son personnage avec l'usage d'un long fume cigarette.
En voiture aussi, il était reconnaissable entre mille : il circulait à bord d'une camionnette réformée des Postes.
Il n'a jamais passé la 4ème, simplement parce que cela ne l'intéressait pas ! Au son, chacun savait qu'il arrivait !
Sorti de l'école des Beaux Arts, il a très vite délaissé le style académique pour se lancer dans une production qu'il espérait commerciale : des Poulbot, des marines et de l'art moderne qu'il qualifiait gentiment de gribouillage transcendantal.
Il se passionnait pour tout : la sculpture avec de vieilles pièces d'automobiles, un tambour de machine à laver, de vieux outils...
Il était aussi peintre en lettres, domaine dans lequel il excellait ! Il ne lui fallait pas plus de 5mn pour réaliser à main levée les plaques d'immatriculation.
Automne 1980, Jean-Claude Dominguès exposait à Condé :
Nous sommes en pleine subjectivité avec l'exposition de Dominguès actuellement visible à la librairie La Spirale, rue de Vire.
D'une peinture abstraite à la transposition d'objets familiers et, pour l'œil qui s'y attarde, voilà du même coup une curiosité aiguisée.
Rien ne peut davantage faire plaisir à cet artiste d'une trentaine d'années que seule véritablement l'indifférence navre.
Avare d'un dialogue direct, il vous le confie avec le truchement d'un lecteur de cassettes glissé dans le ventre métallique d'un bipède, fruit de son imagination (ventre qui fut avant cette nouvelle utilisation celui d'une machine à laver).
Ce n'est d'ailleurs pas la seule épave ménagère à avoir été ressuscitée parée d'un nouveau symbolisme.
Vous n'imaginiez pas peut-être voir en vos robinets de salle de bains une quelconque apparence humaine.
C'est toute la différence entre votre vision et celle de l'artiste...
Voici ce qu'écrivait Gilles Nadin dans Les Echos de la Suisse-Normande du 17 novembre 1983 :
La fin tragique de Jean-Claude Dominguès nous touche. Avec lui, disparaît un personnage, un de ces hommes qui passent dans la vie des autres en laissant une empreinte - une patte faudrait-il dire en hommage à l'artiste.
Une silhouette d'hidalgo, avec un chapeau extravagant : il s'était composé une carrure d'artiste que tout le monde connaissait bien dans la région. Ses idées sur l'Art et sa valeur réelle dans notre société, il aimait les exposer près d'un de ses tableaux. Et ses conceptions frappaient par leur justesse, leur pertinence. Il savait jusqu'où on peut aller trop loin - puisqu'il cultivait l'insolence et l'humour noir à côté de la fraîcheur. Lors de son exposition à la librairie La Spirale, en 1981, les Condéens avaient pu apprécier sa production. Quelques œuvres étaient là avec l'intention de choquer ; mais, à côté, des tableaux traditionnels, d'inspiration réaliste, prouvaient son sens de l'esthétique.
Oh, bien sûr, tout cela, tout ce que j'écris, ce ne sont que des mots - ces mots dont il appréciait le dérisoire et les multiples facettes. J'entends son petit rire moqueur, si caractéristique. Adieu l'artiste !